
Né d’une rencontre musicale et d’une passion commune pour le rock des années 70, Emerald Moon puise ses influences chez Thin Lizzy, Led Zeppelin ou encore Pat Benatar. Entre hard rock, psychédélisme et blues, le groupe défend une identité sonore marquée par des guitares jumelées et la voix soul de Vanessa. À l’occasion de la sortie de leur album The Sky’s The Limit, Fabrice Dutour et Vanessa Di Mauro reviennent sur la genèse du projet, leurs influences et leurs ambitions.
Emerald Moon est né “dans les brumes électriques d’un vieux pub” : vous pouvez nous raconter cette genèse ?
Fabrice : La genèse de ce projet remonte à septembre 2021. Et, pour être plus prosaïque que ce que dit la légende, nous ne sommes pas alors dans un pub, entourés de brumes électriques… En réalité, nous sommes à Paris, au studio 180, et nous venons, Fred Chapellier et moi, d’enregistrer une composition commune pour le Volume 2 de United Guitars. Nous avons l’envie commune d’aller plus loin, dès la fin des prises. François C. Delacoudre est le bassiste de ces sessions et nous décidons logiquement de l’intégrer au projet. De fil en aiguille, le groupe se constitue : j’écris des titres, Fred également. Vanessa Di Mauro, avec qui je partage d’autres aventures musicales, nous rejoint. Nous devons enregistrer un album en mai 2022, mais la participation de Fred à la tournée des Dutronc nous oblige à annuler le studio. Silverheads ne verra jamais le jour, nous n’aurons jamais répété, même une seule fois ensemble. Néanmoins, les titres que j’ai composés et sur lesquels Vanessa a écrit des textes sont là, et il y a l’envie d’aller au bout. Je propose début 2024 à Laurent Falso de nous rejoindre, puis à Michaal Benjelloun. D’autres compositions viennent compléter le répertoire. L’album est déjà notre priorité.

Pourquoi ce nom, Emerald Moon ? Quelle image ça évoque pour vous ?
Vanessa : Nous avons longuement débattu sur le nom. Il y a eu un vote. À une semaine de publier sur les réseaux sociaux, nous n’avions toujours pas de nom. Emerald Moon est la synthèse de deux chansons de Thin Lizzy : Emerald et Dancing in the Moonlight. C’était aussi le nom qui, pour moi, était le plus parlant graphiquement. Il pouvait facilement évoquer les années 70 avec un petit côté psychédélique.
Vous revendiquez des influences comme Thin Lizzy, Led Zeppelin ou encore Pat Benatar. Qu’est-ce qui vous touche particulièrement chez ces artistes ?
Fabrice : Thin Lizzy, comme Led Zeppelin, sont arrivés très tôt dans ma vie, au tout début de mon adolescence, au moment où je commençais l’apprentissage de la guitare. Ils ont nourri mes rêves. Mais au-delà de cela, l’esthétique musicale est celle qui me fait le plus vibrer, encore aujourd’hui. Et pourtant, ma curiosité et ma vie de musicien m’ont amené à écouter et pratiquer bien des styles. Pour Thin Lizzy, il y a, en plus, tout ce que j’aime dans le jeu à deux guitares : les harmonies, deux guitaristes solistes qui se complètent et amènent une énorme richesse aux arrangements de chaque titre.
Vanessa : Il y a chez ces artistes une vraie signature rock, mais également une manière de fédérer autour de chansons emblématiques. Je pense qu’on se retrouve dans leur manière d’appréhender la musique. Pour autant, nous n’essayons pas de copier. Nous avons tous les cinq été imprégnés de cette culture, de ce son rock, et nous y mettons nos influences. Emerald Moon est un mélange de tout ça. Les gens essaient toujours de t’associer à des artistes. Nous sommes évidemment touchés d’être comparés à de tels artistes. Au moment de penser au texte et à la mélodie, la musique me ramène forcément sur ces influences. Par exemple, le couplet de Rock’n Roll Soul a été l’une des mélodies les plus difficiles à trouver. J’entendais cette voix haut perchée, scandée à la manière de Black Dog, car il n’y avait pas beaucoup de place pour chanter, le riff de guitare étant assez alambiqué, je voulais que ce soit simple et efficace. C’est toujours difficile de faire simple ;-).
Au passage, on s’est croisé au concert de Robert Plant, une de vos références ! Un mot sur ce concert à Vienne ?
Vanessa : C’était magique d’entendre la voix de Led Zeppelin, ce grain envoûtant et si reconnaissable. Ce genre de voix me file des frissons. J’y suis évidemment très sensible. Je trouve qu’il y a chez Robert Plant une façon très animale et instinctive de chanter. Sa manière de monter et d’aller chercher les notes comme des cris d’appel à l’amour, un chant vraiment habité. Il a une tessiture incroyable, couplée, à l’époque, d’une puissance phénoménale. Une vraie bête de scène, le genre de personnage qui me fascine et qui, forcément, m’inspire.
Fabrice : Pour ma part, un très beau moment. Tout d’abord, parce que, ce soir-là, j’étais vraiment en phase avec cette proposition acoustique, aux accents parfois celtiques, et les touches orientales que Plant intègre régulièrement dans sa musique. Le concert était de grande qualité, techniquement irréprochable, avec beaucoup de feeling. Il m’a impressionné et touché : charisme énorme, humilité, simplicité et gestion de sa voix et de son énergie, qui lui a permis d’aller chercher, à quelques moments choisis, des notes que je n’attendais pas.
Votre son est une fusion de hard rock, de psychédélisme et de blues. Comment avez-vous trouvé cet équilibre ?
Vanessa : Nous n’avons pas vraiment cherché un son en particulier. Nous avons surtout cherché à créer une musique qui nous ressemble et que nous avions envie de défendre sur scène. Les morceaux sont très différents : hard rock pour certains, blues, rock, folk pour les morceaux acoustiques.
Fabrice : Comme je le disais tout à l’heure, mon ADN est en grande partie dans la musique des années 70, surtout celle empreinte de blues : Led Zep, Humble Pie, Foghat, Faces… Il y a, de temps en temps chez eux, une touche psychédélique inhérente à la période. Je n’ai pas conscience qu’il y ait cette touche dans mes compos…
Les guitares jumelées sont au cœur de votre identité. Comment se passe le travail entre Fabrice et Michaal ?
Fabrice : De manière très naturelle. Les titres arrivent complets niveau arrangement. Pour les parties twin guitars, on choisit nos parties et on se tient à ce qui est écrit. Pour les parties rythmiques, il y a beaucoup de liberté et chaque proposition permet d’enrichir l’arrangement de départ.
« Dans tout projet musical, la voix est le ciment »
La voix de Vanessa apporte une vraie puissance soul. C’est le ciment du projet ?
Fabrice : Je pense que dans tout projet musical, la voix est le ciment, le dénominateur commun des titres, quelle que soit leur couleur ou leur orientation stylistique. Ce qui est, par contre, à souligner dans le cas de Emerald Moon, c’est que Vanessa a vraiment amené quelque chose de très important pour un groupe qui, à l’origine, était très orienté guitares.

Sky is the Limit est votre nouveau disque. Qu’est-ce qu’il raconte ?
Vanessa : Les thèmes sont larges mais, en général, je chante ce qui me touche, ce qui me traverse l’esprit sur le moment, ce qui me met en colère ou me donne envie de crier. J’aime raconter une histoire de manière assez générale afin que l’auditeur puisse s’identifier et s’approprier les paroles.
Après un premier EP discret, on sent que vous avez mis tous les moyens sur ce disque !
Vanessa : En fait, l’EP n’était pas prévu. C’est le fruit de notre toute première répétition que Laurent a eu la bonne idée d’enregistrer. Nous l’avons autoproduit et sorti uniquement en vinyle, histoire d’avoir un produit d’appel avec une esthétique vintage pour commencer à exister. Sortir ces premiers titres live nous a aussi permis de commencer à démarcher.
Fabrice : L’EP est arrivé alors que nous ne l’avions pas prévu. C’est la restitution de notre première répétition. Nous l’avons faite chez Laurent Falso, qui, outre ses qualités de batteur, est un excellent ingénieur du son. Le projet était de sortir un premier titre, d’en faire une vidéo — ce que nous avons fait avec What You’re Told. Mais les trois autres titres que nous avons abordés sonnaient bien et les sortir, sous ce format vinyle, permettait, d’une certaine manière, d’accélérer le développement du groupe. Il y avait quelque chose de concret à découvrir, autant sur le plan musical que graphique. C’était une manière d’attiser la curiosité de ceux qui nous suivaient déjà sur nos projets antérieurs, d’initier le bouche-à-oreille. C’était comme un hors-d’œuvre avant de proposer l’album, avec une diffusion différente.
Comment s’est déroulée la production de cet album ? Avez-vous tout autoproduit ?
Fabrice : C’est une production maison, effectivement. Et cela nous a permis d’avoir une certaine liberté sur l’emploi du temps, qui est difficile à synchroniser au vu des activités de chacun. On a dû travailler à distance, Michaal et François nous envoyant au fur et à mesure leurs parties. Nous avions alors deux répétitions en commun, et quatre des douze titres qui figurent sur l’album n’avaient pas été abordés. Laurent et moi avons assuré la production artistique, les choix dans les arrangements, le mixage. J’avais une idée assez claire de ce que je voulais à l’écriture des titres et des maquettes réalisées en amont. Laurent a fait un magnifique travail afin de donner à l’ensemble une dynamique presque live, puisque c’est ainsi que nous avions fait l’EP et que c’est ainsi que nous aurions voulu réaliser l’album. Il y a eu un côté commando, encore une fois en partie dû à nos emplois du temps respectifs et à la volonté de sortir cet album assez rapidement. Mais le résultat ne me laisse aucun regret.

Le classic rock est souvent vu comme un genre “du passé”, sauf quand on écoute Blues Actu Radio ! Que diriez-vous à ceux qui pensent qu’il n’a plus rien à dire ?
Fabrice : Effectivement, heureusement que Blues Actu Radio existe et continue à répandre la bonne parole. Que dire… Pour moi, le blues et la plupart des courants musicaux qu’il a engendrés, comme le classic rock ou le hard rock, ont un côté intemporel. Là où pas mal d’esthétiques musicales appartiennent à une époque, le classic rock traverse le temps et donne l’impression de ne jamais prendre une ride.
« Je trouve qu’écrire est une excellente thérapie »
Quels thèmes abordez-vous dans vos textes ? Y a-t-il un fil conducteur dans l’album ?
Vanessa : Il n’y a pas de fil conducteur à proprement parler. La musique que je reçois m’inspire un thème, plus ou moins heureux suivant l’ambiance du titre. Je peux traiter de pression sociétale, comme sur le titre What You’re Told, du sentiment amoureux sous toutes ses formes — qu’il soit positif et porteur comme sur The Sky’s The Limit ou On & On, ou plus difficile à vivre comme sur Worry. D’autres chansons sont inspirées de faits divers, de documentaires qui m’ont marquée, comme pour Show Me Your Colours, qui parle d’un amour compliqué inspiré d’images du documentaire sur Syd Barrett, fondateur de Pink Floyd, Have You Got It Yet. Certaines chansons sont plus personnelles, comme Hummingbird, écrite suite au décès de ma nièce de 19 ans. Parfois, il faut que ça sorte. Je trouve qu’écrire est une excellente thérapie.
Sky is the Limit… C’est un mantra, une philosophie ?
Vanessa : La chanson The Sky’s The Limit est arrivée sur le tard. Lorsque j’ai écrit le texte, je me suis tout de suite dit que cela ferait un bon nom pour l’album, et j’imaginais déjà une pochette avec un chemin menant à un ciel lunaire. Cela fait aussi écho à la manière dont nous avons conçu l’album et à la manière dont nous concevons la musique en général : sans limite, sans pression et surtout sans trop se poser de questions. Tenter des choses qui nous ressemblent, en espérant que les gens adhèrent et nous suivent dans notre démarche.
Tous les musiciens de Emerald Moon ont un sacré bagage musical ! Vous avez tourné avec Laura Cox, Gaëlle Buswel, etc. : que vous ont appris ces expériences ?
Vanessa : Je suis celle avec le moins d’expériences scéniques puisque, même si la musique a toujours fait partie de ma vie, je ne suis professionnelle que depuis 2019. Cela m’a appris qu’il n’est jamais trop tard pour croire en ses rêves et les réaliser. Aujourd’hui, c’est un vrai bonheur d’être sur scène avec une telle équipe.
Fabrice : Chaque collaboration nous apporte un peu plus d’expérience et de rigueur. Les exigences et les enjeux sont importants à ce niveau et il faut pouvoir y répondre sans jamais perdre de vue que nous avons la chance de faire un métier qui nous passionne.
Que peut-on attendre d’Emerald Moon pour la suite ? Tournée ? Clips ? Nouveaux projets ?
Fabrice : Nous avons encore quelques dates sur la fin 2025, mais nous travaillons sur l’année 2026, avec l’objectif de réaliser une vingtaine de concerts. Nous envisageons effectivement de sortir un clip avant la fin de l’année et peut-être un autre sur le premier semestre 2026. Il y a également l’envie de se projeter sur le deuxième album, que nous souhaiterions enregistrer à l’automne de cette même année, pour une sortie début 2027. J’ai pas mal d’idées en stock et Vanessa a quelques textes d’avance…
Ecoutez « The Sky’s the Limit » de Emerald Moon sur Spotify
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