THEY CALL ME RICO « Je voulais me faire plaisir avant tout ! »

They Call Me Rico c’est l’histoire d’un mec pris d’une envie profonde de renouer avec ses premières amours, le blues authentique, rugueux et sale, le blues des clubs enfumés et des juke-joints américains. Frédéric Pellerin, alias Rico, est le chanteur du groupe de rock Madcaps au Québec. Mais cette fois-ci, il vient à la rencontre du public dans le plus simple appareil … musical. Pas d’ordinateur, pas de technologie pour ce projet 100% analogique dont le créateur s’est même offert le luxe d’une sortie en vinyle et en K7 audio ! Mais, ne vous méprenez pas,  Rico est bien à classer au rayon des avant-gardistes et non de ceux qui jouent les yeux rivés dans les rétroviseurs. Il signe avec ce 1er album un album respectueux des racines, mais terriblement actuel. Sur la route de sa toute première tournée en France, Rico fait étape dans le Blues Café.

Tu es en France pour ta toute première tournée avec They Call Me Rico. Le public français a pourtant déjà eu l’occasion de te croiser …
Oui, on est venu deux fois l’année dernière avec mon groupe Madcaps. On a fait des concerts surtout dans la région Rhône-Alpes, à Paris et en Bretagne

Explique-nous d’où vient ce nom They Call Me Rico ?
Mon vrai nom c’est Frédéric mais quand j’étais petit, ma mère avait fait un voyage avec mon père en Amérique du Sud où elle avait vu un beau plongeur. Il s’appelait Rico de la Pasquare. Elle s’est mise à m’appeler Rico, je devais avoir 3 ou 4 ans. Aujourd’hui, tous mes amis proches m’appellent Rico. They Call me Rico c’est un petit clin d’œil qui fait référence à des albums de blues « They call me Muddy Waters », « They call me Pinetop Perkins ». Avec « Rico » je trouvais que ça avait une sonorité un peu particulière et qu’il y avait une note d’humour sympathique.

On est dans un registre complètement différent de Madcaps avec un son très roots blues…
J’ai toujours joué et écouté du blues. C’était la musique que j’écoutais quand j’étais adolescent. J’écoutais les Rolling Stones ou Nirvana, ces groupes qui avaient aussi repris des chansons des bluesmen des années 30 ou 40. J’ai mis ça de côté pendant plusieurs années. Avec They Call Me Rico, j’avais envie de faire quelque chose de plus calme, mais dans le fond ce n’est pas si calme que ça ! Je voulais un truc où la voix était plus en avant, moins un mur du son. Mais l’énergie rock revient !

Est-ce qu’il n’y a même pas plus d’énergie à l’état brut dans They Call Me Rico que Madcaps ?
C’est différent. Avec They Call Me Rico, t’es seul donc c’est toi que les gens regardent tout le long du spectacle. Quand tu es dans un groupe, il y a toujours un moment où tu peux aller prendre un verre d’eau et te relaxer. Là tu n’as d’autre choix que d’être concentré du début à la fin et il faut que tu envoies. Ca amène une certaine énergie.

C’est aussi pour ça que tu fais l’homme-orchestre et que tu ne t’accompagnes pas seulement d’une guitare ?
Ca aurait pu être seulement une guitare mais j’aimais l’aspect rythmique. Quand j’ai commencé à jouer de la musique j’étais batteur. Mais souvent je joue aussi sans grosse caisse, ce n’est pas obligatoire.

Quand on est homme-orchestre, on peut plus difficilement bouger et faire le show…
Oui, mais c’est plaisant car ce n’est pas le même rapport avec le public. Avec ce projet, je parle beaucoup plus aux gens, ça vient naturellement.

C’est un album que tu as réalisé tout seul, sur un « 8 pistes » analogique ?
Oui exactement, on a trouvé un vieux 8 pistes qui datait de 25 ans et on l’a retapé. On a fait ça seul avec Vincent Blain, l’ingénieur du son, et quelques amis musiciens.

Ce qui est frappant, c’est le large spectre des reprises, tu passes de Bill Monroe à Robert Johnson en passant par Keb’ Mo’, Neil Young ou Tom Waits…
Ce sont des chansons que je jouais depuis longtemps, dans des soirées entre amis. Je voulais me faire plaisir avant tout ! C’est aussi ce qui fait que les gens apprécient l’album. Je l’ai fait de façon sincère en reprenant les morceaux à ma sauce. Je n’essaye pas de les reprendre tels quels avec le même son ou le même arrangement. Je les ai adapté.

Tu t’es même parfois plus inspiré des reprises que des originaux. Je pense notamment à Prodigal Son où on sent bien l’influence stonienne …
Oui, on reconnaît la version des Rolling Stones mais je voulais quelque chose d’encore un peu plus sale, plus énergique. C’est sûr que je me suis souvent inspiré de reprises ou de certaines versions obscures. Il n’y avait pas de règles.

Faire un album solo, est-ce que c’est aussi un moyen de retrouver de la liberté par rapport à un groupe ?
Oui, totalement. Ca se passe très bien avec mon groupe mais j’avais vraiment envie de ça, d’avoir le total contrôle et de ne faire que ce que j’aime. Dans un groupe, il y a toujours des moments où tu dois faire des compromis.

Actuellement, tu tournes toujours avec les deux projets ?
Oui, on recommence à faire des spectacles cet été avec Madcaps dans certains festivals. Mais pour les 3 ou 4 prochains mois c’est que Rico.

Comment s’est fait l’accueil de They Call Me Rico au Québec ?
C’est très positif notamment au niveau médiatique. J’avais confiance dans le projet mais ça m’a surpris car c’était assez unanime. Habituellement, tu attends toujours la critique qui va te ramasser. Peut-être que ça va arriver mais j’espère que non ! J’étais vraiment surpris de cet accueil des critiques mais aussi des gens qui apprécient l’aspect brut, rugueux du projet.

On te compare souvent en citant des groupes comme The Black Keys ou The White Stripes, ce sont des grosses influences ?
Oui j’adore les Black Keys. C’est peut-être à cause du son de la voix, le son roots, l’aspect blues. En tout cas je les remercie car il y a de nombreux artistes qui profitent de cette vague blues qu’ils ont amené. Ils remettent cette musique au goût du jour et les jeunes s’intéressent à nouveau au blues ce qui n’était pas le cas il y a 10 ans.
Les White Stripes, c’est une influence aussi. Surtout pour le processus parce que Jack White, le chanteur, travaille avec du matériel analogique. C’est un truc qui m’intéresse beaucoup de travailler avec de l’équipement vintage.

Et Elvis dans tout ça ?
Elvis Presley c’est, pour moi, le plus grand chanteur de tous les temps. C’est mon idole d’enfance. Au Canada, à l’anniversaire de sa mort et de sa naissance, il y a eu pendant de longues années des festivals où ils passaient tous ses films et les films de ses concerts aussi. Quand j’étais petit, des amis de ma sœur me faisaient tout enregistrer parce qu’ils n’avaient pas de magnétoscope. J’écoutais et je suis devenu obsédé par Elvis. Je suis un grand fan !

C’est aussi le son Sun Records que tu as voulu retrouver avec cet album enregistré sans ordinateur ?
En fait, ce qui ressemble c’est la façon de faire, on a enregistré tout live avec les musiciens dans la même pièce sur les morceaux où je ne joue pas seul. On n’avait pas le droit de recommencer les pistes de voix ni d’ajouter un autre instrument. Ce qu’on entend, c’est vraiment ce qu’on a fait à ce moment-là dans la pièce. Quand on a mixé, on a utilisé du matériel analogique. On n’a jamais utilisé d’ordinateur sauf pour la conversion numérique à la toute fin pour le CD. Le disque vinyle est 100% analogique.

Car il faut préciser que tu as sorti ton album en CD, en vinyle et en K7 audio !
Oui mais si vous achetez le vinyle ou la K7 vous avez une carte de téléchargement pour télécharger l’album sur votre ordinateur.

Comment vois-tu l’arrivée du MP3 toi qui a l’air très attaché au format album ?
C’est très pratique mais c’est très imparfait. Lou Reed comparait l’écoute de la musique en CD et en MP3 en disant que c’est comme faire l’amour avec ou sans préservatif. C’est un peu ça. C’est bien, mais ça peut être mieux !

Comment tu passes du public de Madcaps au public blues ?
Je pense que c’est sensiblement le même public sauf qu’avec They Call Me Rico c’est plus large. C’est assez énergique pour les jeunes et les moins jeunes s’y retrouvent aussi dans le côté plus intimiste.

On connaît l’attachement à la langue française des québécois, pourquoi chantes-tu en anglais ?
Pour ce style, je préférais chanter en anglais. J’ai toujours composé en anglais, je viens d’une famille anglaise du côté de ma mère, j’ai des ancêtres amérindiens … Mais ce n’était pas vraiment un choix conscient. Je ne me suis pas dit que j’allais chanter en anglais pour avoir une carrière internationale. C’est venu naturellement, peut-être à cause de la musique que j’écoutais, les influences blues.

Comment se porte le blues au Québec ?
Il y a une renaissance du genre. Il y en a eu beaucoup pendant des années puis c’était devenu un style moins populaire. Y’avait beaucoup de Chicago blues ou du blues shuffle énergique mais du blues rugueux, rural, il n’y en avait pas beaucoup. Avec l’apport de groupes comme les Black Keys ou d’autres groupes de folk ou de rock, il y a une vraiment une renaissance.

Quelles sont les suites que tu prévois pour ce projet They Call Me Rico ?
Beaucoup de tournées, en France ou au Québec, ça va s’enchaîner. Je commence aussi à composer pour le prochain album. J’ai beaucoup d’idées de chansons, faut que j’assemble tout ça.

Tu veux rester dans l’expression du « 8 pistes » analogique ?
Je ne veux pas faire la même chose car ce n’est pas bon de se répéter mais je pense que je vais garder le processus d’enregistrement live et l’analogique. Mais l’orchestration va être un peu différente. J’aimerais ajouter des vieux synthés et des instruments qu’on n’entend pas souvent dans le blues, des cuivres, des violons, etc.

Propos recueillis le 9 février 2012 par Cédric VERNET et Francis RATEAU
They Call Me Rico sur le net : http://www.theycallmerico.com

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